Après la publication de trois romans : La gardienne du feu sacré 1979, la vengeance du mort 2009, l'ermite du Djurdjura février 2012, Amar Metref va nous raconter At Yanni dans un livre qui sortira le 17 mai 2012, à ce propos il nous dit en guise de préambule :
"Si j'ai choisi de raconter l'histoire de Beni-Yenni sur le mode légendaire, c'est pour obéir à deux motifs importants : d'abord l'absence quasi totale de documentations écrites, ensuite donner mon opinion sur l'histoire proprement dite…L'histoire, c'est de la parole humaine et comme toute parole humaine, elle peut tromper et se tromper. La légende, à mon avis est plus proche de la réalité, car elle reflète les préoccupations, les souhaits ou les désirs, les espoirs et les appréhensions de petites gens, en réaction à leur quotidiennetés, c'est d'ailleurs ça, la véritable histoire. L'histoire palpitante des peuples, non celle des "historiens" produite par leurs élucubrations, pour défendre et conforter des systèmes politiques, imposés par la brutalité et la trahison. La légende est bien souvent une forme de libération, une manière de briser les carcans. Pour tout dire : Je veux raconter mon Beni-Yenni, non le Beni-Yenni des historiens, des sociologues ou des politiciens, mais simplement le Beni-Yenni de mes souvenirs, de mes souvenirs d'enfance, de jeunesse et de maturité, le Beni-Yenni de mes passions et de mes déceptions, de mes illusions ou de mes désillusions, enfin, le Beni-Yenni de mes rêves. Je veux parler de Beni-Yenni que je porte dans mon cœur, en parler exactement comme le ferait un fils aimant, qui parlerait de sa mère, avec tendresse et respect. Je ne prétends pas écrire l'histoire objective de Beni-Yenni, c'est donc en simple badaud de la vie, que je raconte mes impressions et mes souvenirs sur Beni-Yenni. Je suis conscient du caractère subjectif de mon écrit, je l'assume pleinement, sans réticence aucune. Il est normal alors que la puissance de l'émotion, qui étreint le cœur de l'homme à l'évocation de certains de ses souvenirs, de certains visages familiers et perdus à jamais, de certaines situations intensément vécues ou dramatiquement subites, l'induisent parfois à quelques exagérations ou déformations innocentes ou du moins, qui ne prêtent pas à mal. comme la vapeur qui embue le miroir, l'émotion voix la raison et les images renvoyées par l'un comme par l'autre sont grossies ou déformées mais toujours imprécises et c'est ainsi, qu'il faut accepter la restitution du passé, de part notre nature, nous sommes des miroirs déformants.
A l'occasion du lancement du film "At Yenni parole d'argent" de Arezki Metref, un journaliste, je crois, présent dans la salle avait posé la question "pourquoi un film sur Beni-Yenni ?", cette question méritait elle d'être posée ? Je n'en sais rien, mais en tous cas elle méritait la réponse qu'elle avait suscitée, c'est-à-dire tout simplement une contre question, pourquoi pas un film sur Beni-Yenni ? En effet pourquoi pas ! Pourquoi pas un film sur Beni-Yenni, ou sur toute autre région du pays; Beni-Yenni, Aït Yenni, Ath Yanni, voilà trois appellations pour désigner un petit coin de Kabylie, un petit coin d'Algérie, qui, comme beaucoup d'autres coins mérite d'être exploré, scruté, explicité. Malheureusement, comme pour beaucoup de régions d'Algérie, de l'Algérie profonde bien sur, il n'est pas facile de retracer l'histoire des Ath Yanni, Beni-Yenni est pourtant l'une des tribus qu'évoque Ibn Khaldoun, une des tribus que certains historiens de la régence d'Alger désignaient comme une tribus "Makhzen". Ath Yenni n'est donc pas tout à fait inconnue, car on ne peut pas parler à son sujet d'absence total de documentation historique. Sans se référer au seul Ibn Khaldoun, qui l'évoque avec d'autres tribus importantes, nous pouvons aussi penser au livre d'Emile Carrey "récits de Kabylie", où l'auteur parle abondamment de Beni-Yenni, de sa participation à la résistance contre l'envahisseur en 1857. Des villages de Beni-Yenni qu'il décrivait comme de petites villes bien propres et bien entretenues, où prospérait une petite industrie, des ateliers de différents métiers, des maisons coquettes, dans lesquelles pour la première fois en Kabylie le chroniqueur découvrit des fleurs. Emile Carrey exprime son admiration des habitants de Beni-Yenni par une formule très courte et très saisissante, parce que les villages étaient bien tenus, des propriétés bien travaillées à une époque où même en Europe, les villes et les villages étaient sales miséreux, l'auteur admiratif, qualifia les gens de Beni-Yenni de flamants de la Kabylie."