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La reconnaissance institutionnelle de tamazight et l’intérêt grandissant que suscite, depuis quelque temps, l’arabe dialectal avec, en sus, des appels de linguistes – tels que Abdou Elimam – et de nombreux pédagogues pour valoriser cette langue et l’introduire dans le champ de l’éducation, sont autant d’indices qui dénotent que Ben Sedira était d’un esprit visionnaire et son œuvre constituait une véritable réflexion prémonitoire sur ce qu’adviendra des ambitions futures de son peuple. D’aucuns pourraient toutefois contester l’apport de l’homme dans la mesure où son œuvre ne serait motivée, peut-être, que par des injonctions de l’administration coloniale de l’époque. Elle ne sous-tendrait donc aucune volonté sincère tendant à sauvegarder et promouvoir un quelconque héritage culturel et linguistique. Pis encore, ses travaux et recherches viseraient, selon eux, à aider seulement les occupants français à communiquer dans les langues des indigènes pour mieux les asservir.
Mais qui est Belkacem Ben Sedira ? Qui est cet intellectuel et néanmoins précurseur des études linguistiques en Algérie ? Comment est-il parvenu, en ces temps où l’Algérien ne connaissait que zaouïa et planchette coranique pour s’instruire ou plutôt s’alphabétiser, à faire des études approfondies et à fréquenter de prestigieuses écoles telle que l’Ecole normale de Versailles (1860-1863) ? Comment a-t-il réussi, lui l’homme des oasis, à explorer les sentiers tortueux de l’ethnologie, de la linguistique berbère et de la littérature arabe ? Ce sont là autant de questions qui méritent d’être mises au clair. Pour ce faire, il est intéressant de revenir sur la vie de l’homme en remontant à l’époque de son enfance. Le but étant bien entendu de comprendre les conditions de cette réussite fulgurante et surtout les circonstances qui ont mené l’homme de Biskra à Paris avant de revenir au pays pour s’établir enfin à Alger où il exerça comme professeur à l’école normale jusqu’à sa disparition en 1901. Cette biographie pourrait éventuellement nous renseigner beaucoup plus sur l’homme en vue d’éviter toute affabulation mensongère et tout jugement de valeur. Belkacem Ben Sedira est venu au monde dans le tumulte. Il est né en effet une année après la prise de Biskra par les forces coloniales sous la houlette du duc d’Aumale le 4 mars 1844. On peut donc imaginer l’enfance difficile qu’il a eue en cette période ayant suivi la conquête de sa région. Période où tueries, razzias, insurrections et résistances faisaient le quotidien des populations. L’insurrection des Zâatcha (1848), la révolte de Si Sadek Ou lhadj (1858) sur les monts d’Ahmar Khaddou, une zone située à quelques encablures de la ville de Biskra, sont autant d’épisodes qui devaient sans doute marquer son enfance. Ces faits d’armes témoignent également que sa région n’a pas abdiqué face aux nouveaux occupants français. Elle leur a, au contraire, livré une farouche résistance en consentant de grands sacrifices à Lichana, M’Chounèche, Seriana et dans de nombreux villages et douars de la région des Ziban
Belkacem Ben Sedira, c’était peut-être l’homme, qui n’a rien laissé d’informations ni sur lui ni sur sa famille, refuse ainsi de se confiner dans une quelconque culture régionaliste ou un quelconque carcan clanique. Par l’œuvre plurielle qu’il a laissée, il veut seulement être algérien et appartenir uniquement à l’Algérianité.