Lakhdar, un jeune Kabyle originaire d’un village niché dans les montagnes, travaille comme "garçon" dans le hammam de ses cousins à Tlemcen. À peine sorti de l’adolescence, il triche sur son âge pour s’engager dans l’armée française en 1951, déterminé à partir se battre en Indochine. Était-ce la pleine conscience des risques qu’il prenait ? Peut-être pas. L’appel de l’aventure semblait, pour lui, plus fort que la peur. Ou, dans l’espoir de se forger un meilleur destin ailleurs.
Pendant les féroces et cruels combats, il gardait une forme de sérénité presque candide. Une voyante lui avait un jour prédit qu’il mourrait à 80 ans, et cette parole s’était ancrée en lui comme une certitude. Protégé, croyait-il, par la prophétie, il avançait dans la guerre avec une étrange tranquillité.
Après 1954, il quitte l’armée. Il s’installe en France, enchaînant divers emplois dans plusieurs entreprises, menant une vie discrète mais digne. Ce n’est qu’au cours des années 1970 que les villageois redécouvrent sa présence. Ils apprennent à connaître un homme affable, généreux, et toujours souriant. Dda Lakhdar devient une figure familière et attachante. À chaque passage de la troupe Idebalen dans son village – ou dans ceux alentour – il est là, fidèle au rendez-vous, dansant avec sa canne, au rythme des tambours, comme pour rattraper le temps ou simplement célébrer la vie.
Le 14 mars 2017, à l’âge de 87 ans, Lakhdar At Vetsi, s’éteint paisiblement, laissant derrière lui le souvenir d’un homme libre, joyeux et profondément humain.
Il me plaît de croire, qu'à chaque fois qu'il y a Idebalen à Taxavit = Taourirt El Hadjadj, il nous observe d'en haut comme la joilleuse et brillante lune avec laquelle il partage d'ailleurs la face mystérieuse.